Que la parole présidentielle fut attendue alors que le pays traversait une crise mémorable ! Tel un incendiaire chef des pompiers, Emmanuel Macron fit (comme à son habitude) un coup de com’, relayé le lendemain par une certaine presse aux ordres : « main tendue », « annonces chocs », « Noël social »… A se demander si certains journalistes ne confondent par « carte de presse » et « carte d’adhérent d’En Marche » !
Creusez un peu et la poudre de perlimpinpin se dissipe rapidement, laissant place à un mépris caractéristique de ce mandat présidentiel à l’égard des « petits » et de la détresse sociale qu’ils vivent.
- Annulation de la hausse de la CSG pour les retraites inférieures à 2000€ ? Mais maintien de la désindexation des pensions sur l’inflation !
- Augmentation du SMIC de 100€ ? Mensonge ! Il s’agit de l’augmentation de la prime d’activité, déjà prévue mais avancée. Bémol : seuls 55% des smicards pourront en bénéficier…
- Prime de Noël ? Comment les PME, dont la plupart étouffent sous des charges exorbitantes, pourraient-elles se le permettre ?
- Débat national sur l’immigration ? Pourquoi signer le même jour le Pacte de l’ONU sur les migrations encourageant la submersion migratoire, avec la complicité silencieuse des médias ?
- Pourquoi ne pas évoquer le 1.5 milliard supplémentaire versé à l’Union Européenne (se rajoutant aux 7 milliards de perte nets annuels) et les 2 milliards pour les clandestins ? Comme l’a très justement écrit Franck Dedieu, dénonçant l’absence de marge de manœuvre budgétaire et monétaire liée aux Traités Européens, « Gilets jaunes : tous à l’Elysée ? Non, tous à Bruxelles ! »
La stratégie du chef de l’Etat ? Donner l’impression d’avoir des propositions chocs alors que son discours est destiné à l’opinion, non aux Gilets Jaunes. Cela permet de contourner le mouvement… et de s’accaparer du soutien d’une classe sociale intermédiaire, ni trop pauvre, ni trop riche.
Dire qu’Alain Juppé appelle les « gilets jaunes » à « accepter la main tendue » d’Emmanuel Macron, c’est l’hôpital qui se moque de la charité ! Ce n’est pas en posant une vulgaire compresse sur une plaie ouverte que l’on guérit cette dernière ! Qu’en est-il des hausses qui ont jalonné 2018 (gaz, électricité, essence…), du prélèvement à la source le mois prochain, des nouvelles hausses sur les péages autoroutiers en février prochain ? Rien ! Le Gouvernement est fort avec les faibles, faible avec les forts.
Non, les Français ne sont pas des « Gaulois réfractaires au changement ». Ils veulent de la Justice, garante de l’ordre social.
Pourquoi les culpabiliser sur la transition écologique alors que seulement 19% des recettes de la taxe carbone seront directement dédiés à l’écologie, le reste servant à remplir les caisses de l’Etat ? Quid des traités de libre-échange imposés sans vote des parlements nationaux favorisant les gaz à effet de serre ? Du kérosène des avions et des super tankers non taxé ?
Pourquoi taxer à ce point le loto du patrimoine, initié par Stéphane Bern, à la hauteur de 14 millions d’euros en 2018 alors que cette initiative incarne une faillite d’un Etat incapable de préserver ses biens ?
Les chaînes d’information en continu n’ont eu de cesse d’être à l’affût du moindre débordement, même minime, des Gilets Jaunes, les amalgamant avec des casseurs. Désinformer par omission leur est légitime du moment que l’audience est au rendez-vous. France 3 retirant volontairement le « dégage » d’une pancarte ou LCI « oubliant » de montrer des policiers jetant deux grenades de désencerclement sur une foule pacifique avant la révolte de cette dernière sont symptomatiques d’une certaine presse politisée. Que ne faut-il pas faire pour discréditer un mouvement populaire !
Entre le pouvoir de la presse et la presse du pouvoir, la frontière s’avère parfois bien poreuse…
Les propos de Castaner évoquant les Gilets Jaunes comme « 10.000 personnes sur toute la France ! » seront repris en boucle dans la sphère médiatique. Même ces 2 acolytes n’y croient pas… La guerre des chiffres… propagande insidieuse !
La bonne blague du jour © Castaner.
Les #GiletsJaunes « 10 000 personnes sur toute la France »…
Et la marmotte elle met le chocolat… pic.twitter.com/cnP4x3OqRp— Lucie (@Mandin1914) 7 décembre 2018
De par le matraquage d’informations souvent critiquables de par la subjectivité éditoriale, les chaînes d’information continue participent à une sorte d’aliénation des téléspectateurs tenus en haleine (et en laisse !). Ce prêt à penser, au demeurant anxiogène, met à mort un esprit critique pourtant essentiel en démocratie. L’inconscient est ainsi façonné.
Le Gouvernement et le 4ème pouvoir ressortent les vieilles peurs du placard : les personnes dont le compte courant est vide le 10 du mois, osant manifester sur les Champs Elysées, incarneraient-elles la « peste brune » (cf. Gérald Darmanin) ? Périlleux d’argumenter sur le pourquoi du soulèvement populaire, plus facile d’insulter pour discréditer ! Le même Gérald Darmanin, déclarant qu’il faut « comprendre ce que c’est de vivre avec 950 euros par mois quand les additions dans les restaurants parisiens tournent autour de 200 euros lorsque vous invitez quelqu’un – sans le vin », incarne à lui seul une certaine oligarchie arrogante et méprisante à bout de souffle. Chassez la vie réelle… elle vous reviendra en pleine figure, tel un boomerang !
Bernard-Henri Levy, petit ventriloque de Castaner tout aussi déconnecté de la vraie vie, affirmera son « soutien à Macron, à son combat contre les populismes » en ajoutant que « les gilets jaunes sont les leaders fascistes de 1934 ». Prendre trop de tartes à la crème en plein visage peut visiblement nuire à votre intellect ! Idem pour Jean-Michel Apathie, plume servile du pouvoir et non de la vérité.
Le ton, le contenu, les propositions: @EmmanuelMacron a réussi l’intervention qu’il ne pouvait pas manquer. S’il y a un acte V des #giletsjaunes ilnfaudra en expliquer sérieusement la raison
— jean-michel aphatie (@jmaphatie) 10 décembre 2018
Ceux mettant en garde contre un pseudo « péril républicain » sont les premiers à avoir bafoué la démocratie en ne tenant pas compte du référendum de 2005, en se soumettant aux lobbys divers et variés tout en détournant les citoyens de la vie publique en les dégoûtant. Dégoût même plus considéré à juste titre dans les scrutins : prendre en compte le vote blanc mettrait à mal un système qui a vidé la 5ème République de son contenu (les législatives ne permettent plus la consultation des citoyens à mi-mandat, le chef de l’Etat ne se risque pas à lancer des plébiscites…).
Jean-Claude Carrière #giletsjaunes « Dès qu’il est question d’un référendum populaire Mussolini et Hitler ne sont pas loin » #le79Inter pic.twitter.com/nQfYFzcHTj
— France Inter (@franceinter) 20 décembre 2018
Jean-Claude Carrière : plus c’est gros, plus ça passe ! « Dès qu’il est question d’un référendum populaire Mussolini et Hitler ne sont pas loin ». Les Français ne sont visiblement pas capables de voter comme des adultes, il faut les infantiliser en les éloignant du débat démocratique, comprenez-vous, cela risquerait de rééquilibrer les pouvoirs !
La fleur du mal, Marine Le Pen et plus largement l’opposition, doit être arrosée afin d’assurer son maintien et donc le sien. Le débat politique s’hystérise, surtout à l’évocation de certaines thématiques comme l’immigration et l’Union Européenne, alors que nous sommes en démocratie ! Aller à l’encontre d’une certain pensée ne peut se faire sans s’essuyer les foudres d’une certaine bien-pensance. Qu’importe les arguments avancés par le « déviant », ils seront peut-être écoutés mais… pas entendus. Diaboliser toute pensée alternative tue le débat en le paralysant. S’auto-censurer n’est-il pas le début d’un certain totalitarisme ?
Emmanuel Macron et ses acolytes voudraient que le mouvement des Gilets Jaunes s’essouffle. Certes, la mobilisation a diminué à l’approche des fêtes de fin d’année mais les personnes mobilisées ne sont, pour la plupart, pas défendues par des syndicats (à supposer qu’ils fassent correctement leur travail – la crise qu’ils traversent est tout sauf anodine) et ne peuvent pas s’absenter de leur travail sans risquer de le perdre.
Telle une maladie, la paupérisation s’étend à un corps social étouffant des taxes inégalitaires. Des pauvres de plus en plus nombreux et de plus en plus pauvres, des riches de moins en moins nombreux et de plus en plus riches (lire l’article « 600 000 pauvres de plus en dix ans »). La récente trahison des députés En Marche et Modem, vidant de sa substance le texte de loi proposé par le Sénat visant à lutter contre la fraude fiscale, n’arrangera rien (lire l’article « CumEx Files : les députés rendent le bouclier anti-fraude quasi inopérant »). Dire que Bruno Le Maire avait jugé « inacceptables » ces montages fiscaux ! Encore une fois, il y a la com’ (fictive) et les actes (réels).
Un graphique très intéressant du Monde (octobre 2018) Sans conteste, oui, #Macron est le Président des très riches Noter l’augmentation des revenus des 1% le plus riches, la paupérisation des pauvres et la stagnation des classes moyennes aux portes du déclassement #GiletsJaunes pic.twitter.com/Zyg12C72HZ
— Serge Escalé (@Serge_Escale) 2 décembre 2018
Cette mobilisation populaire prendra, peut-être, une autre forme, comme la constitution d’une liste Gilets Jaunes pour les européennes : cela arrangerait les affaires d’Emmanuel Macron puisque le Rassemblement National, actuellement en grande forme, en sortirait affaibli !
Mais elle se poursuivra.
Emmanuel Todd : « Une immense victoire a été obtenue, le régime de Macron a été brisé. Ils pensaient que la France n’existait plus, qu’ils allaient discipliner les Français et en faire des sujets obéissants. Les Gilets jaunes ont montré que la France existait toujours. Le pouvoir a été terrorisé, ça ne les lâchera plus. »