Clemenceau parle encore


Tourné dans les années 1920, ce court-métrage fut découvert en septembre 2018

« Il faut se dépêcher de prendre en ce bas monde sa part de bien-être. On ne sait pas si on pourra la prendre dans l’au-delà. Les données manquent. » (62)

« Il viendra peut-être un jour où les peuples vivront dans un embrasement fraternel, au son de la flûte, où, seul, parmi tout ce qui naît, vit et meurt, l’homme coulera ses jours dans la paix. Ça n’est pas probable ;  c’est possible. Seulement la question n’est pas de savoir si nous n’aurons plus jamais la guerre et si, dans un avenir plus ou moins éloigné, il se passera ceci ou cela… Elle est de savoir si, du jour au lendemain, nous pouvons avoir confiance dans des gens qui jusqu’à présent n’ont fait que mentir. Un homme m’a donné un coup de couteau dans le dos. Il déclare aujourd’hui : ‘je ne le ferai plus’. Dois-je lui rendre son couteau ? Ne dois-je pas plutôt acheter un revolver ? » (68)

Georges Clémenceau chez lui / Agence Meurisse – 1928

Lui : « Chère Madame, vous n’auriez pas besoin d’un chien ? »
Une invitée : « Merci, Monsieur. J’ai déjà un mari et une fille. » (70)

« Ce qui m’ennuie dans le cas de la France, c’est que je me suis battu toute la vie pour ces choses qu’on appelle la liberté de la presse, la liberté de la tribune, etc. Or, j’en arrive à croire que toutes ces libertés aboutissent au pire des esclavages, qui est l’abrutissement. Avant de rendre les Français libres, il aurait peut-être fallu leur apprendre ce que c’était la liberté, et quel usage il convenait d’en faire. La préparation ne me semble pas avoir été suffisante. » (83)

19 mars 1927, Clemenceau achetant son ticket au Concours agricole, Porte de Versailles /  Agence Rol – 1927

« C’est qu’on a des idées tout à fait fausses sur la vieillesse. D’abord, il n’y a pas de vieillesse ;  on n’est vieux qu’à partir du moment où on prend son parti d’être vieux. » (93)

« Quand on se demande ce que c’est l’action, c’est qu’on n’est pas un homme d’action. L’action est un déséquilibre. Pour agir, il faut être fou. Un homme tant soi peu raisonnable se contente de la pensée. Or, vous, vous êtes équilibré. C’est malheureux pour vous, mais c’est comme ça. Vous êtes fait pour juger. Eh bien ! Bon Dieu ! Jugez ! » (101)

« Rien n’apprend rien à personne : l’âme des gens se renouvelle tout entière tous les jours… Les gens se figurent que parce qu’ils sont d’un temps, ce temps doit être exceptionnel, dissemblable de tous les autres ; ils croient qu’ils verront le commencement d’une ère nouvelle… Alors ils oublient de garder le sentier… Comme s’il y avait des ères nouvelles ! » (122)

« Ce qui donne du courage, ce sont les idées. Or, vos révolutionnaires ont des idées comme ma savate. Ils ont de la bile, de la rancœur… Ça ne mène pas très loin, tout ça. » (205)

A Villers-Bretonneux, Georges Clemenceau et le Général Foch franchissent le portail du Quartier général © Frédéric GADMER/SPCA/ECPAD/DEFENSE

« La Chambre m’a demandé se tête [Foch]. Je l’ai défendu. J’ai d’ailleurs passé ces deux année-là à le défendre. Contre tout le monde. Et j’y ai eu d’autant plus de mérite qu’à ce moment-là je l’avais déjà percé, que je connaissais ses sentiments à mon égard et que je ne l’aimais pas, que je n’aime pas ces gens-là, dans l’âme de qui le cran, le courage cohabitent avec d’autres choses… un peu moins belles… Je l’ai défendu parce qu’il ne s’agissait au fond, dans tout cela, ni de lui ni de moi, mais du pays. » (206)

19 mars 1927, Clemenceau arrivant au Concours agricole, Porte de Versailles  / Agence Rol – 1927

« Qu’est-ce qu’il y a en dehors de la démocratie ? Voulez-vous me le dire ? La démocratie, ce sont les hommes, c’est l’homme. Si l’homme est fou et stupide, c’est évidemment très embêtant. Mais je ne vois pas le remède. Tous les régimes ont fini de la même façon : dans la crotte. […] La chose ennuyeuse dans tout cela, et irrémédiable, ce n’est pas qu’on soit en République ou en Monarchie, qu’il y ait à la tête de l’Etat Doumergue, Deschanel ou Charles IX, c’est que tout ça ce soient des hommes, rien que des hommes. » (290)

Portrait de l’artiste, 1917 – Huile sur toile

« Une chose de lui [Monet] qui est admirable c’est son portrait par lui-même, que j’ai donné au Louvre. Vous le connaissez ? C’est son triomphe. Vous savez : il avait l »habitude de s »installer près de sa petite rivière, de rester assis, là, pendant des heures, à regarder l’eau, les nuages dans l’eau, les fleurs… Il rentrait après ça dans son atelier et, en une heure de temps, il couvrait une de ses grandes toiles. Eh bien ! son portrait, c’est lui, le jour où il a pris la décision de s’attaquer à sa grande frise de nymphéas. Il a les yeux mi-clos, il voit ses toiles, tout ce qui va se passer, sa joie et sa peine. Il avait l’habitude de détruire ses tableaux, de les crever à coups de pied, à coups de couteau. J’ai pu sauver celui-là. C’est une chance. » (213)

[Dans les lettres destinées à Monet] : « Je ne sais pas ce qu’il y a dedans. De l’amitié et des engueulades, probablement. C’est de ça qu’est faite ma vie. Je ne peux pas aimer quelqu’un sans l’engueuler. » (228)

Clémenceau à la Chambre remettant le traité de paix  / Agence Meurisse – 1919

« La République fabrique des quantités de lois : elle oublie de mettre un gendarme à côté. De temps en temps, elle fabrique même une loi pour dire que telle chose était interdite en vertu de tel article de telle autre loi, que cet article n’a pas été appliqué mais qu’à partir d’aujourd’hui, ça va changer, – et vous allez voir ça ! … ce qui équivaut à ceci que la loi proclame elle-même sa carence ! » (285)

La suite dans…

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